Merwane B et Rémi Boyes : un 30-30 qui détonne !
Cet été, les 30-30 sont nombreux ! La scène du Bordel Club accueillait ainsi Merwane B et Rémi Boyes pour 30 minutes de blagues chacun. Retour sur une soirée au Théâtre Montmartre Galabru avec deux humoristes aux parcours distincts !
Divertir l’œil aguerri : tout un programme !
Plus on voit du stand-up, plus on élève son exigence. Il est difficile de retrouver l’insouciance des débuts, surtout quand on entend la même blague pour la 600e fois. De quoi pourrais-je parler à présent ? J’ai parfois l’impression d’avoir fait le tour. Or, je prends moins le temps de prendre une place, désactiver le mode analyse scénique et rire. L’emploi du temps dépasse le calendrier éditorial, et l’instinct reprend le dessus.
Pour le 21 juillet, soit une semaine après mon retour de vacances, j’ai choisi de passer mon samedi soir avec Merwane B et Rémi Boyes. J’avoue avoir une préférence très forte pour le second, même si Merwane s’améliore. La première fois que j’ai vu Merwane jouer, c’était en première partie de Joseph Roussin. Il tremblait, avait des difficultés à articuler ; il avait l’air agité.
Merwane Benlazar : sur la bonne voie
L’inexpérience de Merwane l’amène à débuter le 30-30. Il jouera finalement 48 minutes. Aujourd’hui, il ne tremble plus et il mise sur un regain d’énergie proche du rupteur. Je le trouve excellent dans les interactions et les improvisations associées. Merwane a l’esprit vif. Il a envie de faire du storytelling et il s’accroche. Je respecte cela. Quand il aura le déclic, il deviendra vraiment bon.
Un autre aspect le rend attachant. Il ne triche pas, il ne lâche rien. Sur le même laps de temps, dans un comedy club concurrent, d’autres humoristes abusent complètement de la crédulité du public. Je me suis retrouvée par hasard au Labo du rire du Paname Art Café. En voyant Younes Depardieu, je me réjouissais de voir un habitué de la scène sur ce plateau de débutants. Pour resituer, c’était l’un des membres du duo Younes et Bambi. Le Jamel Comedy Club était leur terrain de jeu, la zone de confort qui leur a donné de la bouteille. Sauf qu’aujourd’hui, il se lance seul. Et il abuse : téléphone à la main, il lit toutes ses blagues, les yeux fixés sur l’écran. Il regarde ses amis davantage que le public. D’ailleurs, ce public, il lui fait croire que c’est sa première scène seul. Sauf que moi, je l’ai vu il y a quelques mois au Private Joke avec la même astuce pour gagner le public ! Et le lendemain, il se retrouve programmé un samedi à 22h30 au même Paname Art Café…
Tout ça pour vous dire que l’humilité de Merwane vaut bien quelques lacunes d’expérience. Je lui accorde sans hésiter ma clémence et lui souhaite de tracer son chemin.
Rémi Boyes : du stand-up de haut niveau
Chaque apparition de Rémi Boyes sur scène est un moment de plaisir. Comme d’autres, il donne envie de le revoir. Haroun dit qu’il faut créer un manque pour attirer le public dans sa salle. Rémi sait se rendre indispensable, c’est peut-être sa plus grande force. Sa décontraction et son côté jovial mettent directement le public à l’aise. Il y a de l’insouciance dans son jeu, et beaucoup de travail derrière. Ses sujets ne sont pas vraiment originaux, mais il les fait vivre avec beaucoup de talent.
Comme il nous le confiait l’an dernier, il essaie d’avoir l’air à l’aise comme dans une conversation de la vie de tous les jours. Autant vous dire que ça marche ! J’attendais avec impatience sa doublade avec Joseph Roussin le mercredi suivant. Il fait partie de ma génération préférée d’humoristes, ceux qui ont commencé en 2014 ou 2015. Ce parti-pris est totalement lié à mes premiers comedy clubs.
Fin 2016, ces humoristes-là étaient suffisamment rodés en plateau pour me sembler totalement pertinents. Je suis attachée à cette génération-là pour une bonne décennie. Malgré tout, je pense que le facteur temporel n’est pas le seul. On a vraiment une excellente génération qui me donne envie de continuer à en parler, pour que vous ayez envie de les voir le plus possible.
Crédits photo
© Christine Coquilleau