Programmer un comedy club pour les nuls
Après être montée sur scène, j’ai eu à programmer un comedy club pendant quelques semaines… avant de me résigner. Vous programmez un plateau d’humour ? Voici quelques astuces pour y parvenir sans encombre. Vous voulez connaître les coulisses de la programmation de comedy clubs ? Vous êtes au bon endroit !
Comment j’ai commencé à programmer un comedy club
Cet été, je croise Certe Mathurin par hasard. De but en blanc, il me propose de programmer le One More Joke avec lui. Qui dit grosse responsabilité dit panique, et parfois même échec. Là, ce fut le cas.
Plutôt que de cracher dans la soupe, je veux vous livrer mes conseils. Voici tout ce que j’aurais voulu savoir avant de m’y mettre !
Programmer un comedy club : le guide pour ne pas foirer
1. Aimer son plateau d’humour
C’est la base. Si vous aimez votre plateau, vous partagez cette affection avec le public. Ainsi, vous pouvez le satisfaire au mieux : vous êtes en phase avec leurs aspirations. Par exemple, je ne traînais pas vraiment au One More Joke, ce qui ne facilitait pas la tâche !
2. Se sentir valorisé
Programmer peut être un pur bonheur comme une tâche ingrate. Pour réussir, il faut donc se sentir en confiance avec le reste de l’équipe. Garder une communication ouverte avec les animateurs et organisateurs me semble essentiel. C’est pour cela que les gens qui ont des plateaux sont amis ou assez proches.
3. Avoir du temps, la tchatche et un carnet d’adresses
Il faut savoir contacter les bonnes personnes au bon moment. Un humoriste peut vous conduire à six autres. Cette statistique n’est pas scientifique mais elle a le mérite de parler à tout le monde. Ne faites pas la même erreur que moi : parlez aux artistes et non aux boîtes de production. Cela me semblait plus facile comme je n’avais pas de contacts, mais cela pose d’autres problèmes. Vous aurez des refus ou on vous demandera de l’argent.
Pour programmer un comedy club, il faut donc être présent sur les plateaux concurrents au quotidien. Gare à vos autres engagements, car programmer prend du temps. Et si vous êtes un peu introverti comme moi, vous allez vous confronter à quelques angoisses. Forcez-vous un peu, même si c’est dur (ça l’est).
4. Être reconnu ou rémunéré à sa juste valeur
C’est évident : vous ne toucherez pas de gros chèque. Plutôt qu’une rémunération, cherchez plutôt à obtenir un avantage : rencontrer les personnes qui comptent, avoir à boire et à manger gratuitement, toucher un pourcentage du chapeau, jouer de temps en temps… Pas de secret : plus les avantages vous sembleront justes, plus vous vous investirez.
5. Connaître son périmètre
Sachez quand et comment prendre des initiatives. Vous devez recevoir des directives claires. Pour avoir l’esprit tranquille, vos choix ne doivent pas être remis en cause. Si vous travaillez à plusieurs sur la programmation, sachez en permanence où l’autre va. Sinon, vous risquez de vous retrouver avec trop d’humoristes sur les bras sur une même soirée. C’est assez lourd, comme vous pouvez l’imaginer.
6. Commencer petit
Vous programmez pour la première fois ? Faites-vous la main sur un petit plateau. Bon, si vous recevez l’opportunité du siècle, soyez transparent sur vos difficultés. Exigez une passation ou une formation dans les règles de l’art. Votre interlocuteur n’a pas forcément l’habitude non plus de faire une passation. Soyez tolérant et patient 🙂
7. Être organisé
C’est du bon sens : vous allez gérer une sorte de planning démoniaque. Vous avez trop de noms à caser et vous devez penser aux indisponibilités (spectacle, tournée, plateau concurrent…). Tout cela en temps limité et en créant des plateaux homogènes : niveaux, styles d’humour… À plusieurs, tout le monde doit partager la même organisation.
Épilogue : les conseils que je ne vous donnerai pas
Sur le copinage
Je ne vous conseille rien sur les amitiés que vous entretenez avec les autres comiques. On m’a dit de ne privilégier personne, or certaines personnes sont privilégiées par amitié sur le One More Joke. Le public n’est pas contrarié pour autant, comme le phénomène est très marginal.
Pour moi, c’est humain : la programmation du One More Joke reste assez juste. Je n’ai rien vu de bien choquant. Tout le monde le fait plus ou moins, sinon on aurait affaire à des comedy clubs stériles. Laissons donc les sensibilités s’exprimer ! Si j’avais réussi mon coup, j’aurais eu la possibilité de faire jouer les copains, aussi.
Sur les aspirations personnelles
Personnellement, j’ai trouvé frustrant de m’occuper des têtes d’affiche. Ma spécialité, ce sont les découvertes et les humoristes qui jouent depuis 2014. Pour eux, j’aurais volontiers sacrifié mon temps libre. Mais pour des gros qui ont les moyens de jouer, d’être en vedette dans le métro, etc., je ne vois pas ma valeur ajoutée. C’est dans mon ADN, et je suis trop indépendante pour me plier à des consignes comme celles-ci.
C’est donc le moment de se remettre en question : pour toute nouvelle fonction, il faut s’adapter et faire des compromis. Je précise que je n’ai pas d’animosité envers Certe. Il m’a fait confiance et a tenté de m’amener dans le game, c’était un risque à prendre. J’aurais préféré un peu plus de guidage, mais il faut être réaliste : le One More Joke était trop gros pour moi. Je suis persuadée qu’il se portera mieux sans moi. Bon courage à Certe pour programmer sans Louis Dubourg cette saison ! Je lui fais confiance : ce plateau tourne à plein régime avec de nombreuses têtes d’affiche et un public conquis !