La découverte du mois – Mars 2019 – Avril
Avril, c’est un nom de scène compliqué à oser, surtout un mois par an. Alors on a décidé d’avancer sa promotion en tant que découverte humour d’un mois, histoire que les moteurs de recherche ne disjonctent pas trop.
L’humoriste dont je vais vous parler aujourd’hui n’a rien à voir avec le calendrier. C’est un vrai humoriste, avec des postures de stand-up, des blagues et même des apparitions régulières dans les plateaux d’humour. Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, quelques préliminaires s’imposent.
Coulisses : comment Avril est devenu découverte humour
Avril n’était pas prévu aussi vite dans cette catégorie de découvertes humour. Je voulais promouvoir Audrey Jésus – c’était prévu, j’ai même découvert le Bonasse Comedy Club pour cela. Mais une pointe de déception a retardé ce plan bien ficelé. Dans le même temps, un humoriste m’avertissait : le spot du rire parle majoritairement d’humoristes blancs, c’est ce qui se murmure, apparemment. J’ai vérifié, et il y a du vrai. Trop occupée à équilibrer le ratio hommes/femmes et à répondre à des commentaires sur les non-binaires, j’ai passé sous silence d’autres minorités visibles. J’avoue aussi avoir du mal à apprécier toute la diversité humoristique depuis que je ne vais plus au Paname Art Café.
Et puis je me suis dit : « tant pis pour cette fois ». J’ai même eu l’idée de faire une exception sur les découvertes pour le Brexit, avec Jimmy Carr et Jack Whitehall. Ce dernier a réussi à offenser le groupe de pop Little Mix lors de l’équivalent des NRJ Music Awards locaux, je me suis dit que je ne pouvais compter sur personne. Avant que tout cela ne s’achève, j’ai repensé à une vraie découverte qui pouvait marcher sur cette histoire de Brexit. Découverte lors de The Great British American Comedy Night, la parfaitement bilingue Ophélie Hocquard m’avait conquise. Enfin bref, cela faisait beaucoup du monde.
En allant au showcase d’Aude Alisque à La Petite Loge, tout a basculé pour de bon. Là, je me suis vraiment dit : « tant pis, YOLO ». Avril était dans le public. Immédiatement, j’ai repensé avec joie à ses prestations scéniques. Je me suis dit que c’était le mois de mon anniversaire. Alors si dans cette société ultra-normée où rien ne doit plus dépasser, je ne peux même plus prendre du plaisir à consommer du comique, où puis-je encore me passionner pour un quidam ?
Avril : faire renouer rire et plaisir
Mes goûts en matière de stand-up font de plus en plus abstraction de ce qu’il faudrait dire. Je me rapproche vraiment de ce qui me fait intimement rire et kiffer. Dans cet article sur les nouveaux plateaux, j’ai intégré une section sur le rapport de séduction entre artiste et public. Il faut croire que ça me travaille beaucoup ces derniers temps, puisque je récidive en me ruant au Laugh Steady Crew sans réfléchir, faisant valdinguer les plans raisonnables pour vous, chers lecteurs.
Ça se passe à côté du Moulin Rouge, au Bar à Bulles. La déco rouge et la chanteuse venue démarrer la soirée pour l’occasion me conditionnent bien à rester dans une ambiance suavemente, et le passage que j’attendais depuis plusieurs jours débute enfin. Je m’attendais à ce que soit bon, mais pas comme ça. Il y avait des idées un peu geeks #pêchémignon #promogratos, un soupçon d’humour noir distillé avec beaucoup de classe et surtout un mec décontracté comme jamais. Du genre de ceux qui se trimballent avec des chemises de bûcheron oscillant entre bon élève poli et vrai séducteur qui n’en a pas l’air mais qui frétille des pupilles et lance des sourires à la pelle.
Et son humour, ça donne quoi ?
Vous l’aurez compris, j’ai complètement perdu le contrôle de l’analyse objective. Morgane Cadignan, qui jouait aussi ce soir-là, m’a dit qu’elle n’était pas étonnée que je choisisse Avril. C’est mon style, à ce qu’il paraît. Je n’ai pas osé demander pourquoi, de peur d’être démasquée. Ce qui est assez cocasse parce que je déballe tout cela ici, mais je ne suis plus à ça près !
Rétrospectivement, j’ai vu les premières scènes d’Avril. A la Topito Open Mic Night, je n’avais pas écrit une ligne sur lui. Je ne me souvenais plus de son passage, ça m’est revenu au Laugh Steady Crew. Je n’avais pas l’impression qu’il était nouveau. Même s’il aborde des thèmes parfois déjà vus, il a ce truc en plus qui fait qu’on a envie de le voir.
Il manie très légèrement l’autodérision, ce qui le distingue de la bande de névrosés assumés qui nous font tout aussi rire. L’écriture et l’interprétation se marient bien. D’ailleurs, j’ai lu quelques écrits sur sa page Facebook : il sait y faire avec sa plume. Encore un bon point. Au final, moi qui craignais d’être subjectivement charmée, je sais que je peux vous le recommander chaudement.
Verdict
Avec Avril, vous n’aurez pas le plus expérimenté, le plus politisé ou le plus retourneur de salles du stand-up. Il débute, comme l’atteste son journal de bord de scène, ce n’est pas le but. Par contre, je peux vous assurer que sur un plateau rempli de jeunes humoristes, il y a des chances qu’il devienne votre préféré de la soirée. Vous aurez envie de le revoir sans trop savoir pourquoi.
Puis, quelques mois ou années plus tard, vous serez fier de dire que vous l’avez connu dès les débuts quand il arpentera des grandes salles. Son destin humoristique est encore à écrire, mais il a tous les ingrédients pour se lancer dans l’aventure. N’est-ce pas là l’essence-même de ce qu’on attend d’une découverte humour ?
Liens utiles
Vous avez aimé Avril ? Découvrez-le dans une interview fleuve en solo. Il forme également un duo avec son acolyte Pierre DuDza, les Ouais Ouais Ouais. On en a profité pour les interviewer tous les deux aussi.
Crédits photo
© Fabrice Mawule Houessou