Soixante artistes – Kyan Khojandi joue la montre

Juliette Follin 27/06/2019

Soixante, c’est le programme d’humour diffusé le 26 juin sur Canal+ en prime-time. Le concept : Kyan Khojandi invite 60 artistes pour une heure de blagues. Retour sur un événement de type « démonstration de force » où chacun avait 1 minute pour s’exprimer, montre en main.

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Soixante : une sélection forcément frustrante…

Pendant cette heure de spectacle télévisé, je me suis transformée en supporter beauf. Je hurlais de bonheur à quelques (rares) reprises, avant de me lamenter. Oh non, pas lui/elle ! (Au passage, la parité semblait au rendez-vous — je n’ai pas compté précisément mais ça avait l’air…)

Je m’attendais à un événement davantage axé sur les découvertes humour. Précision : j’écoute l’émission de niche Les bras cassés sur Couleur 3 en écrivant ces lignes. Autant vous dire que si je me penche sur le sujet, alors je vais être critique.

Soixante, c’est beaucoup moins que le nombre d’humoristes en activité. Pas de Ghislain Blique ou de Pierre Thevenoux, mais on a eu le droit à Paul Mirabel, Solène Rossignol, Marie Desroles et Rémi Boyes.

L’art de la nonchalance

Le problème, ce n’est pas le casting. On reviendra sur quelques perles totalement étonnantes et surprenantes, qui obligent à des félicitations. Non, c’est la nonchalance de certains humoristes présents.

Je pense notamment à Fary et son personnage de scène ultra-arrogant. Avec ton talent, copain, tu peux faire une minute de blagues. Après, c’était aussi nul que malin, donc ça passe encore. Là où je suis plus dubitative, c’est sur le passage de Melha Bedia. Elle a mangé un poulet à main nues, en y versant une tonne de mayonnaise dans son temps imparti.

Issa Doumbia s’est quant à lui contenté de scander le nom des deux humoristes avant et après lui : Yacine Belhousse et Solène Rossignol.

Les amis, la nonchalance, cela se crée avec un peu plus de subtilité que ça. Prenez Monsieur Fraize. Sa prestation ? Pas un mot, puis une référence au fait qu’il n’a pas de texte. Dernières secondes consacrées à regarder le chronomètre derrière lui. Et pourtant… ça marche ! C’est le meilleur teaser possible de son spectacle, car il est fidèle à lui-même et le spectateur ne se dit pas qu’il se fout de la gueule du monde.

S’il se le dit, c’est qu’il n’est pas réceptif du tout à ce type d’humour. Quoi qu’il en soit, le spectateur sait immédiatement si ça vaut le coup de se déplacer. Beau tour de force !

Soixante : de jolis coups de maître

Qui s’attendait à voir Monsieur Fraize dans un format plateau d’humour ? S’il joue à L’Européen, où se tenait la soirée, la scène avait de quoi surprendre. Mais ma plus belle surprise, c’était la venue de Kad et Olivier.

Le bonheur était palpable : ces deux-là ont marqué des générations et continuent d’écrire leur histoire au présent. À mille lieues de la performance d’Élie Semoun. Mais soyons honnêtes : critiquer Élie Semoun, c’est un peu tirer sur l’ambulance. Invoquer le point Nadine Morano ou Éric Zemmour. Et d’ailleurs, 100 % des gens qui m’ont parlé de Soixante décrivaient en des termes peu élogieux sa prestation. Pas besoin d’en dire plus.

Alors, c’était bien ou pas ?

Je vais être fidèle à mes origines normandes : les deux ! On ne peut rien reprocher à cette soirée, mis à part quelques détails. Ceux qui aiment l’humour à haute dose peuvent déplorer la venue de Bigflo et Oli ou Orelsan et tous les intermèdes musicaux. Mais d’autres peuvent au contraire trouver ces respirations bénéfiques.

Autre élément clivant : la direction artistique. Le format télévisuel demande une certaine rigueur, que Navo a apporté avec un talent incroyable. Chronométrer chaque passage pour qu’il dure soixante secondes, c’est une chose. Maintenir ce cadre, je ne m’attendais pas à le voir de mon vivant. Certains ont dépassé de… 3 secondes, excusez du peu !

Parfait, donc ? Le souci, dans ces soirées extrêmement construites, c’est de perdre un petit grain de folie. J’ai pris un plaisir plutôt modéré, parce que j’aime quand l’imprévu arrive. Problème de format…

Ce format reste un excellent coup marketing, comme Le Point Virgule fait l’Olympia sait aussi le faire — mais en mieux. La soirée a suscité plus de presse que Derrière un micro, une soirée stand-up plus classique avec… Kyan Khojandi déjà. En tant que public habitué du stand-up, c’est là qu’il faut s’orienter en priorité.

Crédits photo

© Canal+ / Jaad Productions

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