Alexis Tramoni dans Que ta mère : comique sans gêne
Alexis Tramoni a décroché une programmation à la Petite Loge pour son spectacle Que ta mère. Alexis Tramoni, Que ta mère. Oui, rien que ça. À l’époque, la nouvelle a beaucoup fait réagir : les standards de qualité de cette salle étaient-ils revus à la baisse ? Ou alors était-ce le pari fou d’un exhibitionniste du cul ?
Les gens avaient beau parler, ils n’étaient pas là le jour de l’audition. Moi-même, je ne sais pas ce qui se cache dans la tête d’Alexis Tramoni. Certains le résumeraient sans doute ainsi :
Les cons, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît.
Alexis Tramoni, politiquement incorrect ou incorrection crasse ?
Sexiste, misogyne, raciste, le garçon ? Faut-il séparer l’œuvre de l’artiste ? Pendant que ses collègues dissertaient sur le sujet, Alexis Tramoni le lançait, son spectacle. Quand d’autres annulent, Tramoni attire les foules convaincues par ses vidéos virales. Il pousse le curseur à l’extrême, abuse de la vulgarité et promet de « taper sur tout le monde ». Comme un Gaspard Proust, en somme, l’air propre sur lui en moins…
On retrouve ce besoin d’exutoire dans les salles de spectacles, surtout dans les époques où les discours sont scrutés de près. La portée du message, la responsabilité des propos, le fait d’amener tous les sujets intelligemment… Et si Alexis Tramoni n’en avait simplement rien à branler ?
S’en foutre ou combattre une époque puritaine
Le clin d’œil est tout trouvé avec son homologue du vendredi 20 heures, Ghislain Blique. Pour autant, les deux propositions n’ont pas grand-chose à voir. Le premier est nonchalant, le second provoque à l’extrême.
Par ailleurs, proposer un spectacle comme celui-ci, c’est en avoir quelque chose à branler. Combattre le puritanisme comme on combattrait le réchauffement climatique, ça compte comme message politique ?
Alexis Tramoni dénonce donc le politiquement correct de l’époque avec une folie et une imprécision jouissive. On n’est pas sur le meilleur match technique, mais tout le monde s’en fout. Le public est venu voir un grand n’importe quoi, il est servi. Il m’a rappelé Paul Currie, cet humoriste frappadingue croisé au festival d’Édimbourg qui forçait son public à se murger (entre autres).
Alexis Tramoni et son rire démoniaque à la Petite Loge
Pour le reste ? Il est difficile de décrire ce spectacle sans le dévoiler. Disons simplement que le garçon a (malgré les apparences) une éthique, même si vous en douterez quelquefois. Son rire démoniaque vous fera trembler. Étonnamment, les interactions ne sont pas si violentes que ça (même si vous pouvez recevoir des trucs sur vous au premier rang).
Ses désamorçages de fin de carrière sont aussi des preuves qu’il maîtrise un peu son destin. On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, mais on connaît au moins la recette pour ne pas intoxiquer le public, en résumé.
Certains craignaient un suicide artistique, finalement tout le monde va bien. Le public exultait de voir quelqu’un oser tout dézinguer. S’il faut des spectacles bienveillants, il faut aussi des spectacles comme ça. L’avantage, c’est que celui-ci est ouvert à tous, pas seulement aux « tontons racistes » de France et de Navarre.
Au terme du spectacle, Alexis Tramoni annonce qu’il a plein de projets et qu’il cherche un producteur. À ce stade prématuré, le pari semble fou. Mais un humoriste complètement ravagé et ravageur de salles pourrait bien faire chavirer un Ruquier en mal de réac’titude.