Santini à la Petite Loge, tel un phénix du LOL
En novembre dernier, j’ai vu le spectacle de Santini à la Petite Loge. Une expérience déroutante, immanquable que j’aurais pu complètement louper. Pour le comprendre, voici la critique de ce spectacle deux mois après son lancement !
Assis sur un tabouret, (Julien) Santini débute son spectacle de manière assez statique. On s’attendait à des feux d’artifice, du grand n’importe quoi comme sur les plateaux TV des années 90… Il n’en est rien. Du moins au départ.
Depuis son personnage de Bibou, que certains ont découvert dans cette archive pépite, Julien Santini tente de proposer autre chose. Tenue plus sobre, alternance entre confessions et moments de jeu… Son nouveau fil conducteur, c’est la connerie. Une connerie pure et dure, teintée d’une autodérision jamais gratuite ou destructrice.
Autre moteur du spectacle : la complicité avec le public. On parle souvent d’interactions, mais là, c’est un vrai lien qui se tisse. Un peu à la manière d’un Gabriel Francès, même si les deux artistes ne jouent pas dans le même registre ! Santini chambre sans manquer de respect, quitte à intégrer les spectateurs comme personnages secondaires. Le tout sans les faire monter sur scène. D’ailleurs, il a une définition bien à lui du quatrième mur – et c’est hilarant !
Santini : un clown au service d’un comédien attachant
Certains humoristes sont drôles et perchés naturellement. D’autres parviennent à nous le faire croire. Où se situe Santini ? Ce qu’on peut dire avec certitude, c’est que son style est unique. Mais gare à vous : ne lui parlez surtout pas d’originalité ! On apprend ainsi, non sans étonnement, que notre antihéros du soir aspirait à un brin de normalité.
La frontière du personnage
Quel ingrédient distingue les bons des excellents humoristes ? Souvent, c’est leur capacité à pousser le curseur à son paroxysme. Santini excelle dans l’exercice, même si son début de rodage trahissait une quête de légitimité et d’acceptation du public. On se demande, dès lors, si son personnage scénique initial s’efface au profit d’une posture plus stand-up à mesure que Santini s’assume sur scène.
Où est la frontière entre le réel et le fictionnel ? Il semble s’amuser à brouiller les pistes ; en tout cas, le public se fait balader pour son plus grand plaisir. Et dans l’intervalle, il découvre une série d’histoires aux teintes farfelues, forcément hilarantes et uniques en leur genre.
Un comique d’observation sur l’industrie du spectacle
Dans son spectacle, Santini glisse de nombreux moments de jeu. Je pense par exemple à la parodie de stand-up, impeccablement interprétée. On sent le vécu dans les petites caves, et c’est jouissif. En effet, à l’instar d’Ambroise et Xavier, il arrive à renouveler ce type de parodie pourtant vue et revue dans le milieu.
Se moquer de ses semblables est une chose, singer une trajectoire artistique en est une autre. Nous voilà donc téléportés dans un casting de théâtre dramatique, puis dans une comédie romantique un poil inquiétante. Vous avez beau être dans le plus petit théâtre de Paris, ce spectacle va vous faire voyager !
Verdict : Santini réhabilité ?
Retour en arrière. Quand j’ai découvert Julien Santini, il concourait à l’un de ces festivals où je vivais un calvaire. Je me demandais pourquoi l’on devait s’affliger un rôle de pervers. Je trouvais ça gratuit. Et au fil des années, en le voyant à nouveau à Montreux et aussi chez les nantais, je m’interrogeais de plus en plus.
Avec le contexte et bien d’autres péripéties, l’ensemble forme un tout cohérent, bien plus rassurant que cette première impression. Tout cela donne envie de vivre l’expérience avec et non plus contre l’artiste. Julien Santini était un loser magnifique (cf. titre de son ancien spectacle). Dénué de son prénom, il gagne désormais à être connu. Et l’éclosion est pour très bientôt ! Alors suivez-le dès maintenant, ça va cartonner. Il continuera de jouer en avril, mais 2 fois par semaine, à la Petite Loge, profitez-en !