La mangue ou la mort : le 2e show d’Avril au Théâtre du Marais

Juliette Follin 07/04/2025

La mangue ou la mort est le deuxième spectacle d’Avril. L’ex-pensionnaire du Laugh Steady Crew, passé par la Petite Loge et le Métropole, a pris ses quartiers au Théâtre du Marais, antre du seul en scène humoristique.

À peine son premier spectacle C’était mieux maintenant achevé, Avril songeait déjà à repartir de zéro. C’est dans un épisode de « reset » où il fuyait la crise sanitaire au Maroc, puis au Sénégal, que l’auteur de L’Omphalos a trouvé l’inspiration. Pour monter ce deuxième spectacle, il a aussi pu compter sur son équipe habituelle : Pierre Metzger et Thierno Thioune à la mise en scène.

Après un rodage remarqué à la Ferme Comedy et en tournée, Avril a donc atteint un premier objectif artistique. Depuis janvier, il joue en effet au Théâtre du Marais, une salle à la programmation souvent soignée. On y voit rarement du stand-up pur. Paradoxalement, l’heure d’Avril semblait plus orientée stand-up que la première.

Du dilemme entre La mangue ou la mort au Théâtre du Marais, Avril trouve le juste équilibre et affirme son efficacité comique

Dans La mangue ou la mort, on retrouve certains éléments déjà présents dans le premier spectacle. Faire participer le public à l’unisson avec l’artiste, d’abord. Le contrôle étant sa zone de confort, rien d’étonnant à cela, et ça lui a toujours bien servi dans son persona comique. La raison ? Un savant équilibre entre assurance scénique et vulnérabilité propre au spectacle vivant. Ensuite, le besoin de se distinguer de la masse. Là encore, un point fort salué par le public et la critique depuis longtemps. Or la nouveauté réside ici dans une singularité moins foutraque que par le passé. Avril n’hésite plus, il déborde d’efficacité comique.

Un élément a suscité beaucoup d’effroi dans ma perception du spectacle lors des rodages. Allait-il se sortir d’un inextricable point de vue autour de la femme idéalisée, qui n‘existe qu’à travers cet imaginaire ? Parce que la muse du spectacle, cette femme inaccessible, est le point de départ. Si l’on dresse un parallèle avec l’heure d’Hugo Pêcheur, où le résultat est misogyne au possible, Avril laisse sa juste place à cette Manuela, ne la blâmant aucunement pour le désordre sentimental qu’il conte. Avril l’invoque ainsi via sa quête sans boussole d’anti-héros amoureux, avec un regard lucide sur sa personne. Point de déni ou d’histoire racontée pour avoir le beau rôle : voilà qui fait du bien !

Une écriture impeccable, une connexion avec le public unique

Avril a toujours eu une plume habile. Sa manière de raconter les histoires embarque aisément le public, que ce soit en chronique ou sur scène. Néanmoins, sa singularité ne réside pas que dans l’écriture. En effet, rares sont les artistes qui connectent avec le public en fusionnant authenticité, maîtrise et vulnérabilité.

Les œuvres de stand-up sont autant là pour divertir qu’interpeller, voire remuer. Plus Avril est sincère dans ses élucubrations bloquantes, plus il touche juste dans sa quête artistique. Sa deuxième heure à multiples entrées est tantôt déconcertante, tantôt jubilatoire pour le public. Jugez plutôt cette critique spectateur, écrite plusieurs semaines après avoir vu l’œuvre, car il était important pour lui de partager ce ressenti unique malgré le délai.

[Pour son deuxième spectacle, Avril] nous entraîne dans une nouvelle partie de son existence : un moment de COVID, hors du temps, où la principale préoccupation du fou de Saint-Ouen est simple : doit-il, ou non, envoyer un colis à la surfeuse qu’il vient de rencontrer ? La mangue qu’on lui conseille de mettre, amour/fruit de Schrödinger glissée à l’intérieur, sera-t-elle mûre ou moisie à l’ouverture ? On se perd dans ses histoires avec joie, retrouvant nos espoirs amoureux déçus, notre incompréhension face au monde qui nous entoure, à cette grande chaîne de gens qui ont des bras les uns dans les autres, à cette sensibilité à peine voilée mise au service d’un sourire partagé. À découvrir au plus vite !

Critique spectateur BilletRéduc de Gwokamol

En résumé, Avril a réussi son pari de se renouveler dans un second spectacle en respectant son ADN qui affirme sa singularité comique. Rendez-vous au troisième spectacle pour la résolution de cette tension dramatique entre souffrance et ennui ? Seul l’avenir nous le dira… Mais n’allons pas trop vite en besogne, laissez-vous tenter par cette heure de stand-up qui ne ressemble à aucune autre !

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