Interview Aude Alisque : « Le clown est libérateur, il vous mène plus loin sur scène »
Aude Alisque, je la connais depuis Antek on R ! Cette humoriste manie la folie avec beaucoup de maîtrise. Ce qui est assez bluffant, quand on y pense, vous ne trouvez pas ? Le spectacle vivant est fait pour ce genre de phénomène. Vous ne la connaissez pas encore ? L’interview d’Aude Alisque va vous aiguiller vers un talent ébouriffant. Si vous l’aimez déjà, vous pourrez vous délecter d’anecdotes inédites !
Dans cette interview, Aude Alisque revient sur la construction de son personnage scénique. Ancienne recrue du Laugh Steady Crew, elle livre ses impressions sur ses deux années fructueuses dans la troupe de Thierno Thioune. Vous découvrirez ensuite comment elle a construit son spectacle Tout avait pourtant mal commencé, qu’elle joue à la Petite Loge depuis le printemps 2019. Enfin, elle vous partagera ses nombreuses références et inspirations scéniques !
L’interview d’Aude Alisque – Partie 1 – Qui es-tu ?
Tu es l’une des personnes les plus créatives sur les internets avec tes livres et tes pastilles estivales sur Instagram. D’abord, les stories de vacances, et puis cette année avec La leçon plutôt optimiste. D’où te viennent toutes ces palettes d’artiste complète, au fond ? C’est probablement un atout quand on est en autoproduction…
(Rires) Quand tu évolues dans un milieu artistique, tu as l’espace mental pour pouvoir penser à plein de trucs. Maintenant, c’est drôle que tu dises ça : j’ai l’impression de ne rien faire !
Pourtant, il y a même les chroniques depuis la rentrée…
Oui, c’est nouveau. Les chroniques du mardi dans la matinale de Vivre FM, on me l’a proposé, mais ça ne vient pas de moi ! Pour revenir aux vidéos sur Instagram, c’est important d’avoir une présence. Je me rendais compte que je ne publiais pas de contenu, et je me disais « faut créer du contenu, faut créer du contenu ! » Et j’ai l’impression d’être trop vieille pour être à fond sur les internets, pour faire des vidéos qui soient fédératrices. En revanche, elles sont bizarres, et je fais ce qui m’amuse en fait !
Il faut dire que récemment, le Laugh Steady Crew t’a attribué 27 personnalités en une !
Ça vient probablement d’un monde intérieur, de choses bizarres à sortir. Ce que je regarde m’inspire des choses. J’ai recommencé à regarder tout 30 Rock*, ça me donne des idées aussi. Et c’est très amusant à revoir maintenant que je fais le l’humour. Mais c’est une vaste question… je ne sais pas trop quoi ajouter !
*Série de Tina Fey sur les coulisses d’une émission à sketches sur NBC.
J’y pensais quand j’écoutais l’interview de Déelle, le fait d’avoir grandi comme fille unique m’a souvent amenée à développer une imagination… différente. C’est probablement le cas pour toi aussi !
Peut-être… Par moments, on est dans notre jus. Les moments de solitude et d’ennui permettent souvent de partir, s’évader. Par exemple, j’aime beaucoup marcher. Le mouvement m’aide à réfléchir. Être dans un bus, regarder le paysage, être à vélo, marcher… Bon, à vélo, c’est compliqué de prendre des notes ! Mais ces moments en solitaire sont intéressants, parce que beaucoup de choses émergent. On peut aussi avoir des moments d’échange avec les autres, où les idées fusent à plusieurs et c’est totalement différent. Cela dit, j’ai moins l’habitude de ça.
Pour revenir à l’interview de Déelle, tu parlais aussi des journaux intimes. Est-ce un passage obligé pour se préparer à faire du stand-up ?
Je ne pense pas, parce que les humoristes ne parlent pas forcément d’eux-mêmes. Ils n’ont pas ce besoin. Personnellement, j’adore et je pense que les journaux intimes vont bien avec mon égocentrisme. Je pense toujours : « Je vais le relire dans dix ans, je vais avoir envie de me foutre des claques ! »
Tu as choisi de suivre des cours de clown un peu au moment où tu commençais à jouer à Dimanche Marrant et à progresser dans l’humour. Dans quelle mesure ce genre scénique t’a aidé à aller de l’avant ?
Ça m’a vraiment aidé à me libérer de la peur de proposer certaines choses sur scène. Par exemple, j’avais fait un stage d’une semaine avec Hervé Langlois. Tu commences à adopter un comportement et il te pousse à aller au bout. Au terme du stage, je n’avais plus peur de rien : me mettre à hurler, aller dans l’étrange, lécher un mur. Depuis, les limitations sont parfois revenues. Dans l’ensemble, j’ai réalisé que je n’allais pas mourir si je proposais quelque chose de vraiment bizarre sur scène. Tout passe si tu assumes jusqu’au bout. Ça a tout libéré, et le corps notamment.
L’interview d’Aude Alisque – Partie 2 – Formation : le Laugh Steady Crew et d’autres tremplins
D’autant plus qu’au Laugh Steady Crew, Thierno est aussi exigeant là-dessus. Ces deux expériences étaient donc complémentaires, j’imagine.
Le clown, c’est très important pour lui, au même titre que l’écriture ! Je n’avais fait qu’un stage avant cela, en 2017, au Samovar, avec Els [également passée par la troupe de Thierno, Ndlr.]. J’ai aussi participé à une journée de stage avec Hervé Langlois, prévue avec le Laugh Steady Crew. Au stage d’une semaine, Thierno était là. Au final, on se comprenait beaucoup plus. Quand il lit mes textes, Thierno a tendance à savoir où je veux aller avant que je répète devant lui. Au LSC, on répète tous notre sketch devant Thierno avant le passage le jour J.
Et allier clown et écriture, est-ce si facile que ça ?
Ce n’est pas toujours évident d’allier les deux. Certains ont des points forts sur l’un ou l’autre. Pour moi, c’était d’abord l’écriture, puis c’est devenu le clown. Ensuite, j’ai dû apprendre à écrire pour mon clown. On ne voit pas forcément cela émerger tout de suite, je pense notamment à Avril qui était plus dans l’écriture et qui commence à aimer jouer…
Il est passé par la case théâtre avant le LSC d’ailleurs. Et toi, quel rapport as-tu eu avec le théâtre ?
J’avais fait un peu d’impro et du théâtre au collège, sans plus.
Il faut dire que le théâtre, cela peut faire peur. On peut aimer écrire et ne pas avoir envie de la scène au collège !
La peur sur scène… J’étais terrifiée au début ! Même aujourd’hui, d’ailleurs, même si je commence à vivre de plus en plus de moments où dès que je monte sur scène, je suis prise d’une énergie positive qui surpasse ma terreur. Mon problème, c’est que je rougis très facilement. S’il se passe quelque chose d’inattendu sur scène, ma réaction est immédiate. Au début, ça m’arrivait tout le temps de rougir ! J’ai dû acheter du fond de teint couvrant pour essayer de cacher ça, ce que je ne faisais pas avant.
Quand j’ai débuté, j’ai pris des cours de stand-up avec Alex Nguyen comme beaucoup d’autres humoristes. Il s’amusait à dire à tout le monde : « Il ne faut pas avoir peur ! Regardez Aude, par exemple, la première fois qu’elle est montée sur scène… » Limite, il me décrivait comme au bord de la crise cardiaque tellement j’étais mal !
Malgré tout, tu avais envie de passer outre cette peur.
Je me croyais capable de passer outre ! Et c’est venu avec le temps. Certains sont naturellement à l’aise, ce qui n’est pas mon cas. Ça a peut-être mis plus de temps, mais j’ai réussi à me visualiser sur scène dépasser cette peur. Il fallait juste attendre qu’elle disparaisse petit à petit.
Comment s’est passé ton aventure au Laugh Steady Crew, que tu viens de te quitter ?
J’ai réalisé deux saisons, et je sentais que j’étais arrivée au bout du processus. En plus, avec les chroniques à préparer, je n’aurais jamais eu le temps de mener les deux de front. Quand j’ai intégré la troupe, c’était au moment où je commençais à faire de la scène sérieusement. Ça m’a fait avancer énormément. J’intégrais la troupe et je suivais des cours du soir à l’École du One Man Show.
Entre les deux, le Laugh Steady Crew m’a sans doute le plus apporté et fait évoluer. Être poussée, reconnue de la sorte alors que quand tu arrives, tu débutes ou presque… Avoir l’obligation d’écrire de manière régulière sous l’œil exigeant d’un metteur en scène… Il nous pousse, il est dur mais il le faut. Il arrive à voir en toi quelque chose qu’il essaie de creuser.
Les thèmes imposés, l’exigence de Thierno Thioune… Quel est le plus grand défi pour une humoriste au LSC ?
C’est un mélange entre se réinventer et faire bonne figure face aux autres. Je me comparais tout le temps ! Tu n’as pas envie d’être la moins bonne. Un jour tu réussis, un jour, tu te casses la gueule. Comme je prends tout très personnellement, cela n’aide pas ! Après un bide, il m’est arrivé de fondre en larmes en coulisses. Et si la soirée se passe mal globalement, forcément Thierno n’est pas content ! Tu le prends encore plus pour toi… Je suis déjà rentrée chez moi en me disant : « Je n’ai aucun espoir ».
Quitte à vouloir arrêter ?
Non, jamais… Je me connais, j’aime bien faire exprès de me faire tomber bas pour mieux rebondir. Ça me fait du bien, ça a un effet de catharsis. Pour revenir au défi, le fait de devoir trouver un angle intéressant chaque semaine est complexe. Bien sûr, j’ai encore cette exigence avec les chroniques, mais il n’y a pas de thème imposé. Essayer de rassembler mes idées était plus compliqué au LSC, je partais dans tous les sens.
Surtout que le délai était court !
Oui : on n’avait pas une semaine complète. On devait envoyer les textes à Thierno après seulement quelques jours. Il livrait un retour à prendre en compte pour le jour J. À la fin, je sentais bien que je n’avais plus la même énergie pour le faire.
Comment tu as intégré la troupe, d’ailleurs ?
Maoulé m’en avait parlé. Thierno l’avait vu, je crois qu’il le connaissait et qu’il le voulait dans la troupe. Je crois me souvenir de m’être plaint, j’aime me plaindre : « Comment ça, il y a plein de trucs sympas qui se font ? Je ne suis jamais au courant ! »
Maoulé avait parlé de moi à Thierno, Anne Dupin aussi. Je m’y suis pris trop tard, mais il y a eu des désistements qui m’ont permis tout de même de participer à la deuxième soirée, puis d’intégrer la troupe.
D’ailleurs, avant le LSC, il y avait les Ladies Commandements, une autre troupe !
C’était une idée de Lucie Carbone. Elle a plein d’idées et ce côté entrepreneur : elle crée des choses. Moi, je rentre dans les projets créés par d’autres ou je crée des choses pour moi en essayant de tout gérer seule. Dans les Ladies, il y avait aussi Els – Lost in France, Julie Albertine et Audrey Josse. On se connaissait soit des cours avec Alex Nguyen, soit par les scènes de stand-up. Le concept était de jouer une fois par mois deux sketches de 5 minutes en prenant deux commandements par personne à chaque fois.
C’était pas mal pour savoir comment faire pour les thèmes imposés du LSC, mais le niveau d’exigence n’était pas le même. Parfois, on avait nos textes ou des notes à portée de main pour se rassurer. C’était nous qui fixions le cadre. C’était très cool, et quand tu travailles uniquement avec des nanas, tu as une pression en moins. Tu as moins l’impression de devoir prouver que tu as ta place, et entre nous, il n’y avait pas de rivalité ou de hiérarchie. L’atmosphère des Ladies Commandements était très simple, de fait. On a bien ri, c’était un beau projet, et ça a duré un an et demi environ !
L’interview d’Aude Alisque – Partie 3 – Spectacle : création et promotion
Justement, parlons de la recherche d’approbation et de perfection. Ce n’est pas trop un casse-tête de monter un spectacle d’une heure quand on ressent ce genre de choses ?
Je suis toujours en recherche d’approbation, de tout le monde. Ça me met une pression bête et ce n’est pas du tout une bonne stratégie en général. Une partie de mon cerveau est occupée à s’inquiéter de savoir si l’on va me prendre au sérieux ou si j’ai ma place, c’est fatigant.
Pour assembler ton premier spectacle, tu mélanges un peu tout ce que tu as écrit, et un thème précis ne se dégage pas forcément. Il faut se demander comment faire pour les mettre ensemble. Je n’arrivais pas du tout à le faire, à prendre ce recul. Thierno arrivait à le faire et m’a beaucoup aidé à monter ma première demi-heure. À partir de cette base, pour jouer l’exceptionnelle à la Petite Loge, j’avais vraiment écrit le spectacle toute seule. C’était difficile d’évaluer à quel moment j’étais plus ou moins satisfaite du résultat.
Dans le même temps, j’avais été voir d’autres spectacles. Je me disais que la perfection, je ne la retrouvais pas forcément partout et certaines choses passaient pourtant très bien. J’avais peur, en plus tu étais là, donc ça n’arrangeait pas les choses !
Désolée… (rires)
J’essaie de me dire : tu vas commencer un truc, c’est normal que ce soit imparfait au début. C’est la même chose pour les vidéos : tu te lances, tu en auras des mauvaises. Ce n’est pas grave. Il faut essayer de faire de son mieux : la recherche de la perfection, c’est un piège. Si on y ajoute la peur de l’échec, le cocktail est explosif !
Au final, les retombées presse autour du spectacle étaient positives, avec un article dans Konbini aux côtés de Marion Mezadorian ou Tania Dutel, mais aussi notre critique. As-tu vu les retombées de cette couverture de presse dans le remplissage ?
Les articles ne m’ont pas forcément encore apporté du monde, mais surtout de la légitimité, notamment de la part de mes pairs, et c’est déjà pas mal. Pour le remplissage, j’ai commencé le spectacle au printemps, qui est traditionnellement une période compliquée pour les spectacles, mais ça a pris progressivement, et ça m’a beaucoup appris. J’ai hâte de reprendre en octobre où la concurrence des terrasses et des weekends prolongés sera nulle !
Pour le bouche-à-oreille, je verrai si les chroniques sur Vivre FM fonctionneront ! J’ai déjà de très bons retours donc c’est cool. Pour l’écouter en Île-de-France, la fréquence c’est 93.9. On peut aussi l’écouter en podcast sur leur site www.vivrefm.com ou sur Facebook…
Il y a de l’audience ?
Ils ont une belle audience, oui ! C’est une radio associative, spécialisée sur les thèmes liés au handicap et aux différences, plus largement.
Yohann Lavéant assurait une pastille « Fais-moi l’humour » tous les matins l’année dernière. Je l’avais croisé au plateau Humour d’Origine Caennaise à Caen. On avait sympathisé, il avait bien aimé ce que je faisais sur scène et c’était réciproque. Il avait en tête de créer un groupe d’humoristes pour se partager les chroniques de la matinale. On fera aussi une émission tous ensemble (« C’est meilleur à plusieurs ») le vendredi de 16 h à 17 h, ça commence le 20 septembre ! On jouera aussi plusieurs spectacles ensemble dans l’année. Aujourd’hui, on est 5 à Paris, un à Nantes et un à Metz.
Ils sont super, hyper pros ; c’est donc un très bon endroit pour faire des chroniques. Si l’émission est assez légère, il y a parfois certaines interviews qui abordent des sujets difficiles, donc la chronique est la bienvenue pour égayer l’ambiance. Ils nous font complètement confiance, d’ailleurs ils avaient très confiance en Yohann. Par exemple, je ne montre pas ma chronique avant de la faire. On a une vraie liberté de parole.
Quand on a un univers un peu original, est-il frustrant de voir des professionnels passer à côté de tes propositions artistiques ? La question n’est pas neutre, je pense à la sélection dans certains festivals…
Ce n’est pas ce que je me dis. Je pense que si cela ne fonctionne pas, c’est parce que je n’ai pas proposé le bon matériel au bon moment pour entrer dans tel ou tel festival. Certains cherchent par exemple davantage des sketches. Parfois, il faut envoyer une vidéo ; à d’autres moments, on vient voir ton spectacle ou un jury composé de plusieurs personnes évalue ta candidature.
J’ai peu participé à de telles auditions, il faut que je me renseigne sur cet écosystème. J’en ai deux ou trois de prévus, dont un à Igny en octobre. J’y crois, surtout que je pense que je marche dans les pas de Morgane Cadignan avec un an de retard ! En tout cas, j’espère ! (rires)
Le groupe d’humoristes qui passe sur Vivre FM s’y connaît beaucoup mieux que moi. À l’inverse, je suis la seule parmi eux qui joue sur de nombreux plateaux à Paris.
Tu reprends ton spectacle à la rentrée… Des nouveautés à prévoir ? D’autres actualités à mentionner ?
J’ai fait évoluer le spectacle. Il a évolué pendant que je le jouais, et en ayant fait un point avec Thierno, qui est mon metteur en scène pour ce spectacle, on a essayé de casser quelques trucs qui ne m’allaient pas, des nœuds, donc ça va bouger, mais j’ai du boulot ! Cela dit, je ne l’ai joué que 3 mois à la Petite Loge, d’avril à juin. J’avais fait le showcase en mars.
On ne sait jamais : le spectacle peut encore plus évoluer dans six mois, mais à ce moment-là ce sera un nouveau spectacle. Prenons l’exemple de Rosa [Bursztein] : elle avait joué son spectacle un an avant de le changer drastiquement. Elle voulait passer à autre chose ; je n’en suis pas du tout là. Le but, c’est de gagner en efficacité et d’être aussi satisfaite que possible, c’est déjà un défi.
Le spectacle aborde certains sujets difficiles, ce qui est parfois compliqué. Par exemple j’avais vu le spectacle de Marina Rollman à la Petite Loge qui traite de dépression post-rupture, et avant de le voir, j’ai croisé mon ex dans le métro et ça a altéré mon expérience. Dans ton cas, le clown aide beaucoup à équilibrer l’ambiance…
Le clown permet en effet de faire passer pas mal de choses, de faire disjoncter le fond et la forme. J’essaie de le faire aussi à la radio, même si seuls les gens qui me regardent sur Facebook le voient !
L’interview d’Aude Alisque – Partie 4 – Inspirations
Tu as des inspirations particulières, soit les gens que tu côtoies ou ceux qui sont sur scène ? À qui t’identifies-tu sur la scène actuelle ?
Pour les chroniques, j’adore écouter ce qui se fait sur France Inter : Alexis le Rossignol, Marina Rollman, Tom Villa, Guillermo Guiz. Ils me mettent dans un état d’esprit différent : ça va m’inspirer non pas pour faire la même chose. En réalité, comme ils ont des styles parfois différents, ça ouvre le champ des possibles. Je me dis qu’il n’y a pas qu’une manière d’être efficace.
J’ai aussi le même ressenti pour le stand-up. D’ailleurs, en stand-up… [Aude hésite, réfléchit beaucoup avant de reprendre.] Blanche Gardin est-elle encore une inspiration ?
Elle continue à être citée par beaucoup de monde, en effet.
J’ai l’impression que c’est presque une donnée par défaut d’être inspiré par elle. Je l’étais beaucoup dans le passé, peut-être un peu moins maintenant. J’adore ce qu’elle fait, mais pour l’inspiration, je me dirige peut-être vers de nouvelles choses. A Speck of Dust de Sarah Silverman est une perle. Il y a aussi le spectacle de Marina Rollman, c’était une claque. Je l’ai vue à la Nouvelle Ève, c’était bien écrit. Tout passait de manière très simple, très drôle. Elle était au beau milieu de cette scène, habillée simplement mais avec ses chaussures qui brillent. C’était vraiment bien.
Je suis très impressionnée par Bo Burnham. J’écoute ses chansons à vélo, je rigole toute seule. Il arrive aussi à aborder des choses très sérieuses, sombres. J’admire cette manière de s’autoriser à parler de quelque chose de très sérieux d’un coup. Quand je le fais, je ris en même temps. Je cherche le rire à tout prix et je n’en parle pas tant que ça, finalement. Lui, il va y aller, il va créer cette tension qu’il va relâcher. Ça me rend très admirative. Patton Oswalt l’a réussi aussi.
Et en France, y a-t-il un humoriste qui se démarque des autres ?
Sur la scène actuelle, Yacine Belhousse est ma référence. Je suis incapable de faire ce qu’il fait, mais je rêve de le faire ! Je suis hyper cliente, je suis comme une enfant. J’accroche à mort, je sais que ce n’est pas le cas de tout le monde. Pendant longtemps, à chaque fois qu’on se côtoyait sur scène, je voulais qu’il voie ce que je fais. Mais quand ça arrivait, soit il arrivait après mon passage, soit il partait en m’annonçant. C’était frustrant, j’étais très à la recherche de son approbation.
On parle de Yacine comme beaucoup parlent de Ghislain [Blique], aussi. Ce mec, je l’adore. Pendant les podcasts avec Mathias, j’adore quand il est là car il a une répartie très, très forte. Sur scène, je kiffe grave.
J’aime beaucoup Doully également. Il faut absolument que je voie son spectacle, je n’ai pas encore eu le temps… Sinon, Marine Baousson, Shirley Souagnon… Mon cerveau fait blanc sur ce genre de question, il y a tellement à prendre un peu partout.
Ça me fait plaisir car habituellement, les gens ne citent que des américains car ils ont peur de s’engager sur cette question !
Là, je parle surtout des inspirations. Évidemment, j’apprécie de nombreuses personnes — je ne veux vexer personne, bien sûr ! À l’international, je suis très admirative de Tina Fey et j’aimerais savoir penser mes textes comme Louis C. K., mais juste mes textes. Je ne regarde pas tout le temps du stand-up : parfois, je n’y arrive plus. C’est notamment le cas quand j’écris, car je me compare beaucoup. J’ai l’impression que si je regarde trop de spectacles, je vais arriver à ce point où je vais me demander ce que j’ai à apporter à l’humour. Et pendant que je vais voir un spectacle, j’ai parfois des idées qui viennent mais je ne peux pas prendre des notes. On penserait que je cherche à copier. Ce que j’entends me fait penser à quelque chose et l’idée que je vais écrire n’aura aucun rapport à ce qui a été dit sur scène. C’est le fameux « Ah oui, je pourrais faire ça ! ».
Interview Aude Alisque – Le débrief
Aude Alisque a à cœur de proposer un personnage scénique singulier. Cette interview d’Aude Alisque révèle son objectif principal : progresser et livrer le meilleur d’elle-même. Loin d’être paralysée par ses doutes, elle va de l’avant grâce à de nombreuses expériences sur scène et en-dehors.
C’est l’archétype de l’artiste qui se démène pour vous proposer quelque chose de différent et original. Chaque décision prise l’amène à en apprendre plus sur elle-même et sur son métier de comique. Voilà ce qu’on appelle un artisan du rire. Vous savez, cette espèce qui peuple les plateaux d’humour pour notre plus grand plaisir… On lui souhaite de continuer son chemin et de conquérir de nouveaux publics qu’elle saura ravir avec son premier spectacle et les suivants ! On parie aussi que cette interview d’Aude Alisque ne sera pas la dernière que vous lirez !